Quand le regard devient rencontre - interview de Véronique van der Wielen
Dans le regard de la dessinatrice et thérapeute Véronique van der Wielen, on lit la bienveillance et la justesse d’une personne qui a fait le choix de s’écouter pour mieux rencontrer l’autre. Une personne avec laquelle vous avez l’impression de pouvoir entrer tout de suite vraiment en contact, de manière simple et authentique.
Interview à cœur ouvert de cette artiste intuitive au parcours étonnant, qui sera présente lors des prochaines journées Emergences les 7 et 8 septembre prochains, autour d'un thème, "Changer de regard", qui lui correspond à merveille. (Infos: journeesemergences.org)
Un parcours hors des sentiers battus
Partie un an au Népal à l’issue de ses études de droit, Véronique vit cette expérience comme une révélation : « Cela m’a ouvert les yeux sur le droit d’être qui l’on veut être et pas ce que les autres veulent que l’on soit. A mon retour, la première chose que j’ai faite fut de m’inscrire à l’académie des Beaux-Arts. C’était tout simple, juste une inscription, mais je n’osais pas me le permettre avant.
J’ai aussi démarré un premier projet qui avait du sens à mes yeux, en implantant à Bruxelles les « Dream apéros », des événements de mise en réseau autour de passions communes et de rêves et projets que l’on souhaite réaliser. J’ai alors quitté le barreau, et commencé à me rendre compte, grâce à ces événements, que ce j’aimais surtout, c'était mettre les gens en lien. »
Comment ton projet artistique est-il né?
« Depuis toute petite, je me disais qu’un portrait, c’était le plus beau cadeau que l’on pouvait faire à quelqu’un. En 2011, lors d’un stage à l’académie d’été, j'ai voulu représenter « la femme libre », et j’avais un peu de mal à trouver des représentations de celle-ci, à me l’imaginer. Le dernier jour de stage, le modèle m’a proposé de se mettre à ma disposition, et là, ce fut comme un petit tour de magie. Elle était super ancrée et j’ai commencé à la dessiner en la regardant dans les yeux. Je n’avais pas trop besoin de faire attention au trait et n’avais pas trop d’obligation de résultat car je comptais mettre de la peinture après. Et là, tout le monde fut surpris. Le prof m’a dit : « surtout, n’y touche pas. En fait, c’est ça ta femme libre. » Dans ce trait libre, dans cette liberté de mouvement du modèle qui n’est pas figé. Les autres me disaient aussi : c’est marrant, on dirait que c’est toi. J’ai continué à faire quelques portraits, et chaque fois, c’était une femme complètement différente ; femme fatale un peu triste, amazone, étudiante un peu chipie, comme si j’avais saisi différents aspects d’elle, plusieurs facettes de sa personnalités s’exprimant selon les circonstances.
Par la suite, ta démarche a pris une dimension plus introspective…
« Oui, j’ai commencé par faire des séries comme ça, puis j’ai commencé à collecter le ressenti des personnes.
Et là, ce furent comme de petites pépites d’or, car ces dessins étaient comme une reconnaissance de la personne, il y avait un côté humain très fort. Au début, la personne est mal à l’aise, puis quelque chose s’ouvre.
Depuis lors, je demande donc à la personne d’avoir une intention lorsque je la dessine : pourquoi se laisse-t-elle regarder ? Puis elle commente le dessin, un peu comme de l’écriture automatique, et je prends note des mots. Sous un regard bienveillant, c’est étonnant comme une personne peut se révéler, c’est une démarche profondément humaine de se regarder et de regarder l’autre. Souvent, à la fin, lorsque nous relisons les mots ensemble, elle s’exclame : « Eh, mais c’est mon histoire ! »
Comment ton activité de thérapeute s’est-elle mise en place en parallèle? Et comment le lien s’est-il fait entre les deux ?
« Combiner la réalisation de portraits à mon activité de thérapeute en constellations familiales permet beaucoup plus de choses à mes yeux. Dans un portrait, je dis à la personne : « je te reconnais », «tu existes », ce qui crée un lien. Je suis partie d’une démarche artistique, mais les portraits, comme les dream aperos, sont l’occasion d’une mise en lien qui, comme quand on voyage, demande que l’on aille au-delà de nos peurs. Il y a aussi quelque chose qui est lié à la symbolique du trait qui, au propre comme au figuré ici, crée du lien.
Et ce cheminement vers autrui se nourrit apparemment d’un cheminement vers toi-même ?
Pour moi, entrer en lien avec les gens dans la bienveillance a ouvert une boîte de pandore : celle d’un cheminement en soi, vers soi.
Ces portraits ne relèvent pas que du savoir-faire, mais aussi voire plutôt du savoir être. Par cette démarche artistique, je me « reconnais » de plus en plus, et donc je reconnais l’autre également. La clé est dans la sincérité du lien à soi et à l’autre. Je ne cherche pas à faire un beau dessin et on s’en fiche, ce qui fait que je suis souvent surprise du résultat. Le mental passe au second plan, et j’ai l’impression que tout mon potentiel intuitif s’active.
Cela peut donner des trucs assez fous parfois, et certains me disent que c’est un don. Peut-être, je ne sais pas. Lorsque je me contente d’un portrait, je fais deux-trois dessins, mais dans la version thérapeutique, j’en réalise cinq, pour avoir plus de matière. Souvent, le premier correspond à l’apparence que l’on donne, puis c’est un peu comme des épluchures d’oignons, ou un peu comme si on tirait des cartes de tarot. Et peu à peu, c’est vraiment une histoire qui se raconte.
Quels sont tes projets actuels?
Outre les séances de constellations familiales et les expos, j’ai un nouveau projet en entreprise : réaliser le portrait des tous les travailleurs de l’entreprise et pouvoir l’afficher, le mettre en forme pour travailler le lien entre collègues. Le but est de remettre l'humain au coeur de l'entreprise et de (re)créer du lien à travers le regard.
Je réalise aussi des portraits de groupes, couples, familles, enfants et nouveau-nés.
Enfin, je suis aussi très intéressée par l’accompagnement de projets de transition où souvent, malgré toutes les belles valeurs, l’ego finit par faire capoter les choses. Sinon, côté perso, je reste une nomade dans l’âme, et je pars encore souvent à l’aventure en van avec les enfants, mais j’ai aussi constaté que ce magnifique voyage intérieur a commencé quand j’ai cessé de voyager autant extérieurement. »
Infos et réservations pour les Journées Emergences: journeesemergences.org
Plus d'infos sur Véronique Van der Wielen:
- Projet LYDLY - "Les yeux dans les yeux": www.lydly.be.
- Activité thérapeutique: www.constellations.lydly.be. Prochaine date « constellations familiales et portraits « les yeux dans les yeux"» le 26 juillet 2019 (de 9h30 à 17h30) à Saint-Gilles.
- Agenda: Véronique vous donne également rdv chaque mois à l'espace serre du Cook & Book de Woluwe (de 15h à 19h) pour un portrait en solo/famille/groupe/couple. Prochaines dates: le 25 juillet et le 29 août 2019.